Fondation des Alliances Françaises»Alliances Françaises dans le monde»Actualité de la zone»Amérique latine - Caraïbes»Résonances internationales de la francophonie en République dominicaine – exposition « Héroïnes »

Amérique latine - Caraïbes

Résonances internationales de la francophonie en République dominicaine – exposition « Héroïnes »

« Héroïnes » a pour ambition de donner une voix authentique aux récits souvent négligés des femmes, dans leur diversité, dans ce pays qu’est la République dominicaine, connu principalement pour ses plages paradisiaques.  Ce projet, porté par deux artistes françaises disposant d’une expérience interculturelle avérée,  Sandra Reinflet & Mathilde Delahaye, a été sélectionné dans le cadre du programme « Résonances internationales de la francophonie”, à l’occasion du Sommet international de la francophonie 2024.

La République dominicaine, caractérisée par sa diversité mais aussi par ses inégalités sociales, offre un terrain fertile à une expression artistique engagée. Le projet « Héroïnes » incarne cette réalité complexe, où les voix plurielles, particulièrement des femmes, sont  étouffées par des conventions et codes sociaux.

À travers la mise en lumière de 22 récits de vie, via tout d’abord des ateliers d’écriture et d’expression et espagnol et en français puis des séances photographiques, il s’agit donc de valoriser la force et la résilience de ces 24 femmes dominicaines, de tous les âges et issues de tous les milieux. Pour l’Alliance française, c’est aussi une belle opportunité de recréer des partenariats, notamment avec le Centre Culturel Espagnol, la Fondation « Abriendo Camino », le Centro de la Imagen et une diversité de milieux.

Parmi les femmes sélectionnées, nous avons pu voyager dans l’univers de la cuisine vegan à Saint-Domingue, la coiffure afro de Santiago, le breakdance ou encore la production de cacao.

Ces trois semaines de résidence de création participative, qui se sont déroulées du 16 avril au 4 mai, d’abord à Saint-Domingue puis à Santiago, ont aussi permis aux femmes de se rencontrer, au-delà de l’apparence qu’elles véhiculent, aux équipes des Alliances de faire un pas de côté et de devenir traqueurs d’espaces propices à la photographie, facilitateurs de rencontres…

En septembre, le Festival dominicain Foto Imagen exposera les 22 portraits en plein air, dans sur la plaza Colon à Saint-Domingue, puis, en octobre, dans un espace public de la ville de Santiago.

Nous avons le souhait que ces femmes puissent être exposées au-delà des frontières de la République dominicaine. Ce projet « Héroïnes » est une mise en exergue de la complexité d’une réalité et de la dignité de ces femmes qui luttent pour plus de liberté et ouvrent la voie à une société plus inclusive.

Ivanne Girard, directrice de l’Alliance Française de Saint-Domingue

 

Retour d’expérience de Sandra Reinflet, artiste-photographe

La rencontre avec les femmes du projet Heroïnas a été évidente. Les Alliances Françaises de Santo Domingo et de Santiago avaient sélectionné des participantes de 18 à 87 ans, aux parcours et milieux sociaux divers, et qui étaient toutes très enthousiastes et volontaires. J’ai été surprise dès les premiers ateliers, de la facilité avec laquelle elles partageaient leurs histoires, alors même que le processus de mise en confiance est d’ordinaire une partie importante du processus. Elles se sont livrées avec sincérité tout de suite, on sentait qu’elles avaient envie, voire besoin d’être entendues. Avec la metteuse en scène Mathilde Delahaye, nous avons récolté leur parole, puis envisagé avec elles une transposition à l’image de la place qu’elles occupent dans leur environnement.

La partie repérage est très importante et a été facilitée par les équipes des Alliances, qui connaissent bien les lieux et ont tout de suite compris le type de paysage que nous recherchions pour traduire l’intime. Il ne s’agissait jamais d’illustrer ou de proposer un reportage, mais de transposer, d’évoquer sans paraphraser le récit.

Les participantes, d’abord surprises de voir que nous ne cherchions surtout pas de lieux « carte postale », mais pouvions trouver de la beauté dans une déchèterie, ont vite adhéré et joué le jeu de la mise en scène dans l’espace.

Je les ai à chaque fois senties fières et heureuses d’être regardées, mises en lumière. Qu’elles viennent de milieu populaire ou privilégié, elles ont en commun d’avoir dépassé beaucoup d’obstacles, dont, à minima, celui d’être des femmes dans un pays patriarcal. J’ai aussi découvert avec elles les problématiques de racisme, si présentes ici. Les discriminations subies par les femmes à la peau plus noires que les autres, l’interdiction de porter les cheveux crépus au naturel dans les entreprises… La solitude des femmes dont les hommes disparaissent et qui doivent porter la famille et garder la tête haute… Il y a eu quelques larmes pendant ces ateliers, mais une sororité et une fierté d’être mises en valeur qui m’ont fait réaliser l’importance de ce projet. De la République Dominicaine, on parle du tourisme de masse, des plages et des cigares, mais de la culture, la diversité et la force des femmes, peu, ou pas assez. J’espère que ce projet contribuera à sa toute petite échelle à faire entendre leurs voix.

Sandra Reinflet

© Photo de Sandra Reinflet : @Vincent Nageotte

Autres photos : @sandra reinflet