Après une édition virtuelle en 2020 et une suspension totale en 2021, l’un des programmes socio-éducatifs phares de l’Alliance Française de Medellín, la Récré pour tous, a repris de plus belle cette année. Au format initial est venu s’ajouter une connexion avec notre programmation culturelle via l’invitation à des artistes français en résidence ou en lien avec l’Alliance à aller à la rencontre des élèves.

Un programme social exemplaire

En 2005, sous l’impulsion de l’Alliance Française, en étroite collaboration avec la Direction de l’Éducation de la Ville de Medellín, naît le programme académique Francés para todos, auquel succède en 2013 une version plus adaptée aux contraintes et besoins des institutions éducatives : La Récré pour tous. L’objectif : proposer aux institutions éducatives publiques de la ville une immersion dans la langue et la culture française à travers des activités pédagogiques et ludiques.

Depuis 2013, ce sont 72 institutions éducatives de la ville avec lesquelles l’Alliance Française a collaboré, permettant à près de 4000 élèves de bénéficier de cette expérience unique. La particularité du programme est qu’il propose une approche du français par la pratique d’activités aussi diverses que le sport, le théâtre, les arts plastiques, les jeux etc. L’ensemble de ces activités est proposé au sein des établissements dans le cadre des activités complémentaires les après-midi et animé par l’équipe enseignante de l’AFM.

De ce programme ont émergé de vrais parcours de réussite. C’est le cas par exemple d’Oscar Peláez pour qui cette “rencontre” avec le français a marqué le début d’une

véritable vocation l’amenant à devenir plus tard professeur de français à l’AFM puis coordinateur pédagogique. D’autres ont poursuivi des cours de français à l’AFM, voire des études en France. Les étudiants les plus consciencieux passent les examens DELF. Autant d’exemples qui ont conduit, au fil des années, d’autres Alliances du réseau colombien à s’en inspirer et a développé le même concept localement, comme Barranquilla, Bogotá et Bucaramanga.

En 2019, avec l’appui de l’ambassade de France, le programme a même permis à 5 jeunes étudiantes de bénéficier d’un séjour de 15 jours en France. Le programme a été conçu de telle manière qu’il a aussi été l’occasion de donner accès à certains des élèves participants à des bourses pour étudier le français à l’Alliance, voire pour étudier en France ou au Québec.

Preuve que ce programme a une ambition principale : celle d’ouvrir le champ des possibles à des jeunes et de leur présenter de nouvelles opportunités.

En 2022, dans le contexte post-pandémique, la reprise du dialogue avec la Ville de Medellín a permis une relance en présentiel du programme, bénéficiant à plus de 300 élèves de 10 institutions éducatives.

Des artistes en résidence à la rencontre des élèves

L’Alliance Française a décidé d’inscrire au cœur de son ambition culturelle la présence artistique longue, convaincue que le facteur temps est un prérequis pour créer une relation réellement forte entre un artiste, un territoire et ceux qui y vivent. Ainsi, la programmation culturelle de l’AFM est ponctuée depuis cette année de résidences d’artistes, qui sont autant d’occasions de créer des liens forts et des expériences uniques avec et pour nos publics.

Sur un modèle assez classique d’éducation artistique et culturelle en milieu scolaire, l’AFM a donc proposé à des artistes français et francophones d’offrir un peu de leur temps pour aller à la rencontre des élèves du programme, nouveauté de cette année.

Ainsi, Quitterie Simon, auteure jeunesse venue en résidence à Medellín pour un projet d’écriture dans le cadre d’une Bourse Stendhal (soutien Institut français) obtenue avant la pandémie, a partagé sa vision et sa démarche artistique via des ateliers d’écriture.

Aniara Rodado, chorégraphe, artiste et chercheuse à l’École Polytechnique de l’École normale supérieure Paris-Saclay, a profité de son invitation à Medellín pour une première étape de résidence de recherche, pour évoquer, à travers deux ateliers, son travail autour du transféminisme, de la sorcellerie et des relations interspécifiques qu’elle explore à partir du monde végétal.

Frédéric Dumond, poète et artiste, a entamé en avril dernier un travail de reconnaissance et de prise de contacts pour une future résidence de création autour des langues natives de Colombie, accompagné par la Faculté de langues de l’Université d’Antioquia, qui constitue par ailleurs le principal vivier de futurs professeurs de français de la ville. Ses interventions ont mêlé ateliers d’écriture et poésie.

Enfin, Aurélie Sement, artiste vidéaste, vivant à Medellín, et qui assurera prochainement le commissariat d’une exposition collective au Musée de l’eau, est intervenue dans plusieurs classes pour travailler la question des images et de leurs représentations, via un dispositif simple ne requérant pas de matériel audiovisuel.

Bien qu’il ne fut pas simple de faire coïncider le programme des artistes et les contraintes calendaires des établissements, il n’en demeure pas moins que ces rencontres privilégiées avec des artistes, dont les projets témoignent toujours d’une dimension interculturelle forte puisque ancrés localement, ont nourri la curiosité des élèves.

Désormais, l’Alliance de Medellin cherche à redonner du souffle à ce programme pour les années à venir, en l’élargissant à d’autres territoires par exemple, et l’expérience artistique, qui a donc fait ses preuves, fera désormais partie intégrante du projet.

Yann Lapoire, directeur, Alliance Française de Medellín