Née avec le percement du canal de Suez, en grignotant sur le lac Manzala au sud et sur la mer Méditerranée au nord, Port-Saïd est riche d’une histoire et d’un patrimoine uniques : chaque rue et chaque bâtiment racontent cette construction humaine et évoquent le passé cosmopolite de la ville. Depuis quelques années, le patrimoine architectural de Port-Saïd doit cependant faire face à l’abandon et même la destruction. De jeunes Port-saïdiens se sont ainsi organisés sous le nom d’Ala ademo, ce qui signifie « à l’ancienne », pour sensibiliser la population et sauver leur patrimoine. Depuis sa création, l’Alliance française de Port-Saïd s’est également donné pour mission d’aider à la sauvegarde de ce patrimoine en péril. Parallèlement à ce triste constat, il en est un autre à souligner : l’amour des jeunes Égyptiens et Égyptiennes pour les selfies !
Alliant ces deux constatations, l’Alliance Française de Port-Saïd et Ala Ademo ont organisé un concours de selfies pour sensibiliser la jeunesse locale à son patrimoine architectural.
Pendant 12 jours vers minuit, un selfie devant un lieu patrimonial était posté sur l’événement Facebook « psheritageselfie » et son compte Instagram. Les participants devaient alors retrouver le lieu et se prendre en selfie avec les mêmes détails que sur la photographie originale. Le ou la plus rapide remportait des points bonus.
Les lieux, et donc les points, étaient répartis en niveaux de difficulté. Plus l’angle était serré, plus le lieu était considéré comme difficile. Mais ces échelons n’ont pas été estimés de la même manière par tous les participants. « Une des photos difficiles était très facile pour moi car c’est juste en face de ma maison ! », nous raconte Khaled. « Mais certains lieux étaient vraiment difficiles à trouver ! Pour l’un d’entre eux, je connaissais le quartier, mais pas la localisation précise. J’ai cherché longtemps et puis j’ai finalement demandé à des commerçants », poursuit-il.
Les participants ont tous apprécié d’avoir un rendez-vous quotidien pour partir à la chasse au patrimoine. « C’était comme une chasse aux trésors géante ! On vadrouillait dans les rues la nuit à la recherche des bâtiments, c’était très amusant ! », s’exclame Hoda. «Parfois, la photo mettait du temps à être postée, alors on rechargeait tout le temps la page pour être sûrs de ne pas la rater ! Et puis on se dépêchait de chercher le lieu», explique Khaled.
Ce concours a permis à Karim de sortir de chez lui pendant les vacances, avoue-t-il en riant, mais surtout de découvrir Port-Saïd : « Je ne connaissais presque aucun des endroits, alors j’ai demandé de l’aide à ma sœur ». C’est également ce que souligne la mère d’Omar, 12 ans, le plus jeune des participants et le gagnant du concours : «C’était l’occasion pour lui de mieux connaître Port-Saïd, je suis très contente qu’il ait participé.» PSheritageselfie est même devenu un jeu familial pour Rima et son père puisqu’ils allaient chercher les lieux et prenaient les selfies ensemble.
Surtout, ce concours a permis aux participants de regarder leur ville d’un nouvel œil, en prêtant attention à des détails qu’ils n’avaient jamais remarqués auparavant. Khaled admet ainsi qu’il a « trouvé un des lieux bonus par hasard, [en faisant] les magasins ! »
Après les douze jours de compétition, Ala Ademo a guidé les participants sur les lieux qu’il fallait trouver. La visite s’est terminée à l’Alliance Française de Port-Saïd, où étaient exposés les plus beaux selfies. A l’arrivée des participants, toutes les photographies étaient face cachée pour que ce soit eux qui les retournent ; une exposition pensée de manière interactive pour prolonger l’idée de chasse aux trésors. Chacun a ainsi cherché ses propres selfies tout en découvrant ceux des autres, qui redoublaient en créativité.
Finalement, tant la visite que l’exposition ont été l’occasion pour les participants et leur entourage de découvrir l’histoire de Port-Saïd, mais surtout de faire de nouveaux selfies !
Flore Bernier, directrice, Alliance Française de Port-Saïd